Dans les bois de la gouvernance, je me suis promené
« Beaucoup de gens ne réalisent pas que le Gouvernement fédéral a des clients. Nous avons des clients. Le citoyen américain. » Bill Clinton.
La raison-d’être de la gouvernance devrait être d’une part, d’améliorer la qualité de vie des citoyens, qu’ils soient des usagers du service public, des entrepreneurs du secteur privé, des opérateurs de la société civile et d’autre part, de fortifier leur capacité à développer davantage l’état de la Nation. Le rôle de gouvernance est ainsi d’apporter une valeur ajoutée, voire des impacts, aux objectifs institutionnels, économiques, socioculturels, technologiques ou autres. Ne faudrait-il pas alors toujours se poser les questions suivantes :
Que font les dirigeants ou que sont-ils entrain de faire en ce sens?
Que devraient-ils faire ?
Quelle valeur ajoutée en termes de performances atteignent-ils dans cette direction ?
Car au fond, les citoyens et les acteurs d’une Nation sont surtout intéressés par les résultats atteints, voire par l’impact. Alors un défi est de vraiment les connaître, de cerner leurs besoins, leurs perceptions, etc. Cela peut sembler évident, mais difficile à atteindre, si l’on ne se pose pas les questions suivantes sur ces citoyens et acteurs:
Qui sont-ils vraiment ? Qui bénéficie des programmes et des activités ?
Quelle valeur ajoutée peut-on leur apporter ?
Comment s’assurer que cette valeur est apportée ? Comment apprécier et mesurer les performances en ce sens ?
Pour les jeunes pays en voie de développement, il est certain que la compétition mondiale les invite à disposer de ce qu’il est convenu d’appeler des « organisations de classe internationale », dont on a pu conclure qu’elles:
utilisent des moyens variés pour localiser et être à l’écoute de leurs clients;
se basent sur une planification stratégique qui conditionne la budgétisation et l’allocation des ressources ;
sont mues par des valeurs et des visions fortes, définissent ce qu’elles sont et où elles ont l’intention de se diriger ;
s’appuient, par une intention délibérée de leurs dirigeants, sur un système continu de planification stratégique qui tire profit d’un ensemble structuré de processus à tous les niveaux de l’organisation ;
développent la capacité de leurs membres à la planification stratégique et disposent d’un processus de communication, clé de réussite dudit processus de planification stratégique ;
utilisent des critères de mesure de la performance, corrélés à des incitations et à des récompenses, lesquels leur ont permis de mettre en place à tous les niveaux un système d’obligation de rendre compte ;
• ont intériorisé une culture d’innovation en mettant au point un processus de changement orienté vers la clientèle, etc. »
Changement ! Leadership ! Vision ! Ces termes, bien plus que des mots, sont importants, au réel. Rien ne se fera durablement sans eux, car penser que le système de gouvernance ou de management axé sur la performance, les résultats et la qualité est un exercice formel, voire quantitatif ou un formalisme, est un leurre.
En fait, un grand défi est là, pour l’Afrique, car pour nous, les intellectuels et managers africains qui avons le privilège de vivre les réalités, il est important de prendre de la distance et de les conceptualiser. De la sorte, les modèles, les idées et les concepts se nourrissent des réalités, la recherche allie le développement et l’action, et par une synergie, la pensée et l’action s’interpénètrent.
Cet ouvrage se situe dans cette perspective d’un Auditeur, Inspecteur général d’Etat, féru de diagnostic, qui a aussi occupé des positions de direction, à un très haut niveau, par exemple de directeur général de l’Ecole Nationale d’Administration et de Magistrature du Sénégal, de Consultant international du système ONU-DESA-ACBF et de bien d’autres organisations. Ces positions ont constitué pour lui un observatoire de pays qu’il a visités, en voyage d’études ou en qualité de consultant international.
Par les découvertes, les discussions avec des décideurs, des gestionnaires, des personnes en position de pouvoir, ses pérégrinations tentent de donner à la réalité du fait vécu et expérimental une vision systémique et conceptuelle. Découverte d’une variété de réalités organisationnelles, ensuite rassemblées.
Les questions de l’ouvrage se déploient en termes de problématiques et de solutions : peut-on formaliser des concepts utiles et opérationnels sans une profonde intégration des réalités organisationnelles, des acquis conceptuels et des pratiques de management et de gouvernance ? Peut-on, au-delà des micro-organisations, mettre en place un management stratégique intégré qui produit des impacts au niveau étatique ?
Avec l’expérience et les pérégrinations de l’Auditeur et du consultant, au contact d’expériences qui réussissent ou échouent, une question fondamentale est la construction d’une vision et d’un projet d’excellence partagés, orientés vers l’impact et la gouvernance entrepreneuriale. Mais ce projet, en Afrique, pour l’instant, se heurte à des obstacles politiques, socioculturels, de gestion et de distribution des pouvoirs et des compétences, à la quasi-impossibilité factuelle et provisoire de prendre son destin en main. Il faut pour cela le courage et la lucidité de la marge de manœuvre qui permettent de penser par soi-même et pour soi-même, en restant ouvert aux autres, pour parler comme le poète Léopold Sédar Senghor.
En fait, ce qui intéresse l’auteur, c’est une vision systémique, le management, l’audit et la gouvernance devant former un tout, dans une perspective entrepreneuriale. Ce qui l’intéresse, ce sont la vision, la stratégie, la tactique en termes de choix organisationnels et de mise en œuvre, d’action, de résultats et d’impacts. Pour l’auteur, la gouvernance, c’est cela. En tout cas, elle aurait dû être posée en ces termes et non dans la perspective réductrice de la dichotomie gouvernance parlementaire, administrative, judiciaire ou autre. Ce faisant, les choix actuels dominants empêchent l’action, les résultats et l’impact et valident l’adage chinois que la vision sans l’action est inutile.
Cet essai va dans ce sens. Qu’il s’agisse des organisations publiques, de la gestion des projets et des agences de développement, du management hospitalier, de la gestion électorale, des stratégies de gouvernance, en s’y promenant, l’Auditeur découvre la synergie faisable. Au cours des pérégrinations dans les méandres de la gouvernance, du management, de l’évaluation et de l’audit dans le secteur public, bien des leçons ont été apprises. Qu’est-ce qui marche bien ou ne marche pas ? Pourquoi ? Comment ?